Que font les mantes religieuses l'hiver ?
Protéger les mantes religieuses l'été, sous leur forme adulte bien connue, c'est facile, mais l'hiver ?
Rappel de leur cycle de vie.
Octobre, et tout l'hiver, et jusqu'en mai
Pour croiser l'année prochaine le doux regard flou de la mante religieuse, il faut avant tout préserver les oeufs pondus à l'automne. Mais où sont-ils ? Voici l'armoire où ils sont rangés : l'oothèque. Chaque strie comporte une série de "rayons", eux-mêmes composés de tubes, qui abritent des oeufs enveloppés dans une fine membrane. On peut en trouver accrochées dans la végétation, sur des pierres, des arbustes, sur les fenêtres ou les volets, et, au potager, dans les légumes. C'est pourquoi le nettoyage d'automne dans les jardins ou le rangement du mobilier d'extérieur est souvent fatal aux oeufs.
Juin
Dès que la température devient favorable, c'est le moment de la naissance. La petite mante peut devenir verte ou brune, plutôt café au lait. Verte, elle sera parfaitement camouflée dans l'herbe fraîche, brune, elle passera inaperçue dans les herbes sèches. La couleur n'a rien à voir avec le genre, mâle ou femelle. Si les jeunes mantes résistent au froid et aux pluies, elles entrent alors dans la chaîne alimentaire et participent à la régulation des population d'insectes du jardin. En grandissant, elles deviennent extrêmement voraces. Elles sont armées de pattes ravisseuses, hérissées de piques auxquelles aucune proie ne résiste. Elles se nourrissent selon leur taille de sauterelles, de chenilles et d'autres insectes. Devenues grandes, elles peuvent capturer des oisillons ou des chauves-souris. Une grande partie est dévorée à son tour par les lézards, les couleuvres, les pies-grièches, quand elles ne se dévorent pas entre elles. Elles sont inoffensives pour les humains, sauf quand ils ont l'idée malencontreuse de les manipuler, leurs pattes pouvant engendrer des blessures.
Selon les époques et les régions du monde, elles peuvent être aussi bien importées pour lutter contre la pullulation des insectes ravageurs, que considérées comme invasives, ou bien alors elles sont protégées. Notez que la mante religieuse est classée comme espèce vulnérable en Allemagne, et protégée en Ile-de-France.
Juillet
Les petites mantes qui ont échappé aux intempéries et aux prédateurs ont subi cinq mues. A la sixième elles acquièrent des ailes. A ce moment elles deviennent adultes et sont capables de se reproduire. On peut alors facilement distinguer les mâles des femelles à l'oeil nu : les mâles, de 4 à 6 cm environ, plutôt agiles et fluets, paraissent deux fois plus petits que les femelles, et leurs antennes sont démesurément longues ; les femelles, de 6 à 8 cm, ont des antennes plus courtes et un ventre rebondi, ce qui limite leurs déplacements. Au jardin, on voit plus souvent des mâles haut perchés dans les légumes et les femelles près du sol.
Ce qui est fascinant chez les mantes, c'est leur faculté de vous suivre des yeux grâce à leur tête mobile qui peut pivoter à 180° en gardant le reste du corps parfaitement immobile. Leur regard est tout-à-fait curieux. En fait elles ont cinq yeux, trois yeux simples qu'on devine à peine entre les antennes, et deux yeux à facettes, ceux que l'on voit immédiatement, de chaque côté de la tête. Mais leur pupille est minuscule ce qui leur donne un regard mystérieux, un peu absent.
Et ceci sans compter les faux yeux : elles ont entre les pattes deux taches noires, des ocelles, qui évoquent des yeux, pour impressionner leurs adversaires.
Août
La surexcitation des femelles à la veille de la reproduction entraîne des bagarres entre elles assez spectaculaires, avec force vibrations d'ailes. Dans leur attitude guerrière, elles adoptent la position "spectrale", ailes déployées en éventail. Les mâles pendant ce temps attendent patiemment que les femelles soient à maturité pour tenter leur chance chacun à son tour. C'est l'accouplement et le sort funeste que la mante religieuse femelle réserve aux mâles, qui a fait sa réputation de femelle fatale, et qui en a même fait une emblème du féminisme. En effet, tandis que le mâle obsédé par le sexe abandonne toute vigilance, il arrive que la femelle le dévore après ou même pendant l'accouplement. Et ceci en commençant par la tête. Ce qui n'empêche pas ce mâle, même sans tête, de transmettre ses spermatozoïdes et de continuer son travail de fécondation des oeufs. Certains, en prenant la précaution d'éviter les pinces de la femelle, ont la vie sauve et arrivent à repartir comme ils sont venus.
Septembre
Une fois les oeufs fécondés, les femelles se consacrent à la ponte, leur seule et unique ponte de l'année. Elles libèrent une sorte de mousse semblable à des oeufs battus en neige, où elles rangent, un à un, deux ou trois centaines d'oeufs minuscules. Deux heures après la ponte, la mousse gluante durcit et brunit au contact de l'oxygène pour former un bouclier creux. La période de ponte peut se poursuivre jusqu'en octobre ou novembre. L'oothèque protège les oeufs pendant les sept ou huit mois d'hiver et de printemps, et le cycle recommence.
Octobre, novembre
La mante religieuse adulte ne passe pas l’hiver. Quelques semaines après la ponte, la femelle meurt, les mâles meurent en novembre dès que le froid arrive.
Cette mante vient de finir la construction de son oothèque sur l'encadrement de la fenêtre et s'en va.