Alerte, mes rosiers sont ravagés !
Ces bestioles qui excellent dans l'art d'optimiser l'espace et d'avancer en brigades serrées pour dévorer les feuilles sont des "fausses chenilles", en réalité les larves de la tenthrède du rosier (Arge pagana).
Les tenthrèdes, un millier d'espèces en Europe, sont aussi appelées "mouches à scie" car elles déposent leurs oeufs dans les tissus végétaux grâce à un organe conçu à cet effet, l'ovopositeur, qui est chez elles en forme de scie. Et pourtant ce ne sont pas des mouches mais des hyménoptères comme les abeilles, les guêpes, les bourdons et les fourmis. Seule différence : elles n'ont pas de taille de guêpe.
Des ravageurs voraces
A l'éclosion, les larves mesurent moins d'un millimètre. Elles s'attaquent aux feuilles les plus tendres à l'extrémité des jeunes pousses. Grégaires, elles s'accrochent en rangs serrés à une feuille par leurs trois paires de pattes et leur abdomen pend dans le vide. Si elles se sentent attaquées, elles se redressent comme un seul homme en formant un S.
Elles grossissent très rapidement si bien qu'elles peuvent consommer des feuilles de plus en plus épaisses. Elles s'éparpillent alors dans le rosier et il arrive que chaque feuille porte une larve. Après avoir grossi et mué plusieurs fois, les larves se laissent tomber au sol où elles peuvent se nymphoser dans un cocon qu'elles tissent en sécrétant de la soie. Deux ou trois générations se succèdent chaque année, si bien que la population croît de façon exponentielle si les prédateurs manquent ou si on n'intervient pas. Les adultes de la première génération de l'année émergent au printemps et les pontes commencent aussitôt.
Que faire pour préserver les rosiers ?
Lorsqu'on les découvre, les larves ont en général commencé à défolier les jeunes pousses, qu'elles dévorent en ne laissant que les nervures. Etant donné qu'elles sont très grégaires, il suffit en s'y prenant très tôt, quand elles sont encore minuscules, d'enlever les feuilles attaquées et de les jeter le soir sur une terrasse ou une allée dallée sur le passage de quelque hérisson. Si vous intervenez le matin, ce sont les oiseaux qui s'en occuperont.
Généralement, une plante peut survivre avec seulement un tiers de son feuillage, le rosier n'est donc pas en danger, sauf si on est absent du jardin plusieurs mois.
Comment les rechercher pour agir le plus tôt possible ?
La ponte ayant lieu dans les tiges tendres, donc les plus jeunes, on sait où concentrer ses recherches. Les rosiers grimpants ou les grands rosiers arbustifs sont plus difficiles à examiner, c'est seulement en constatant les premières feuilles squelettisées qu'on pourra intervenir.
La ponte laisse aussi une blessure sur les tiges, chez la tenthrède du rosier ce sont deux rangées de minuscules cellules qui ont contenu un oeuf. Chez d'autres espèces, les cellules sont disposées sur une seule rangée. Vous avez de fortes chances de trouver des larves un peu au-dessus.
Enfin lorsqu'on repère une larve déjà grosse, des grappes de minuscules larves se trouvent souvent dans les parages.
Comment prévenir les attaques ?
D'abord, ne pas laisser les larves tomber au sol en les ramassant sur les rosiers, ni les jeter sur la terre ou un paillage où elles pourront s'abriter pour passer l'hiver puis se nymphoser. Les déposer uniquement sur une surface inerte. Biner le sol aux alentours avant l'hiver et au printemps pour les exposer au froid et au passage des prédateurs.
Et justement, favoriser les prédateurs (oiseaux, musaraignes, fourmis, araignées...) et plus généralement une biodiversité très riche, facteur de régulation des ravageurs.
Une autre tenthrède dévoreuse des rosiers
Il y a quelques années, les rosiers de notre région étaient dévorés par une fausse chenille translucide et parfaitement lisse : la tenthrède-limace du rosier (Endelomyia aethiops). Contrairement aux larves décrites plus haut, elles n'atttaquent pas le bord des feuilles mais grignotent la cuticule en laissant de grandes zones desséchées. Les larves s'enfouissent dans le sol protégées par un cocon.
Il y a deux générations par an, la première émerge en juillet-août, la seconde hiverne dans le sol et attend le printemps pour se nymphoser.
Et une troisième
Celle-ci, la tenthrède rouleuse des feuilles du rosier (Blennocampa pusilla), est moins grégaire. On repère facilement les larves assez tôt en observant le feuillage. En effet les femelles adultes pondent sur la face inférieure des feuilles, près du bord. Grâce à leur ovopositeur, elles piquent le limbe de part et d'autre de la nervure centrale. Les feuilles piquées se déforment alors et s'enroulent en forme de tube, protégeant les larves.
Elles grignotent ensuite les feuilles, puis arrivées à leur dernier stade, elles se laissent tomber au sol puis s'enterrent et hivernent dans un cocon. Elles se nymphosent au printemps suivant. Il n'y a qu'une génération par an.
On les distingue des chenilles car elles se roulent en boule parfaite dès qu'elles se sentent en danger.
Informations complémentaires
Pour préserver une riche biodiversité, voir Abris et nichoirs, Inviter la faune au jardin, Une haie pour les oiseaux, Une mare pour la faune, etc.
Pour éviter les pesticides, voir Vous avez dit nuisible ?
Et le livre Merveilleuse faune du jardin