Inviter les hirondelles
Parmi les cinq espèces d'hirondelles nichant en France, deux fréquentent les jardins : l'hirondelle rustique (Hirundo rustica), avec sa face pourpre et ses très longs filets (les deux fines plumes de la queue), et l'hirondelle de fenêtre (Delichon urbicum) avec sa gorge, son ventre et son croupion blancs. Pour le reste, même éclat métallique et comportement similaire.
Adorées des humains
Dès l'école primaire, les enfants sont fascinés par ces petits oiseaux capables de traverser la Méditerranée et le Sahara, mais peu d'entre eux peuvent encore en voir tant leur population décline. Les hirondelles existaient avant nos villes et villages, avant les fils électriques, mais elles ont bénéficié de l'agriculture traditionnelle, avec les prés et les champs, espaces ouverts qu'elles préfèrent à la forêt. Elles ont aussi apprécié les bâtiments, sites de nidification plus nombreux et confortables que les grottes et falaises naturelles. Quant aux humains, ils les ont bien acceptées car elles consomment énormément d'insectes considérés comme défavorables aux cultures. Malheureusement la situation s'est retournée avec l'agriculture intensive, l'élevage industriel et l'utilisation massive de pesticides qui les ont privées de nourriture.
Les causes de leur régression
Les effectifs sont naturellement variables car liés aux aléas météorologiques, néanmoins les estimations donnent une perte d'au moins 40 % ces trente dernières années.
Les causes sont multiples. On pense naturellement aux pesticides répandus dans les cultures, mais elles sont aussi pénalisées par les antiparasitaires des animaux d'élevage, qui les privent des insectes qui tournaient autour des troupeaux et des étables.
Nos bâtiments trop lisses, la mode des immenses surfaces vitrées, voire des immeubles exclusivement recouverts de vitrages, ne leur permettent plus d'accrocher leurs nids. Les maisons et leurs dépendances sont de plus en plus isolées et hermétiques, les trous d'aération n'existent plus. Les granges et diverses petites annexes des fermes sont transformées en habitations ou en garages fermés.
Enfin le réchauffement climatique rend la migration plus éprouvante lors du survol des déserts.
Une migration fascinante
Les hirondelles sont présentes en France de la deuxième quinzaine de mars à septembre-octobre pour leur nidification, puis elles migrent vers l'Afrique subsaharienne. Pour résister à un tel voyage, elles ont besoin d'énormes quantités d'insectes pour accumuler des graisses. Les petits hirondeaux sont de véritables gloutons, et à peine sont-ils autonomes, qu'ils commencent, comme leurs parents, à fabriquer les quelques grammes de graisse qui leur permettront un voyage de 10 000 km. Leurs réserves leur permettent d'effectuer soixante heures de vol d'une traite.
Notons que dans leurs migrations, les hirondelles reviennent sur les lieux où elles sont nées, c'est pourquoi les villes abandonnées à cause de la pollution sont très rarement recolonisées lorsque des efforts ont réduit ou supprimé cette pollution.
Pour les inviter, il vous faut :
- Des flaques de boue au moment de la construction des nids. Les urbanistes préservent de plus en plus des zones humides en ville, plutôt que de les drainer ou les combler, ce qui permet de voir une noria de transport de boulettes de boue au printemps, que les oiseaux malaxent avec de la salive et maçonnent comme des briques. L'hirondelle rustique y ajoute d'autres matériaux disponibles sur place pour consolider le nid, notamment des herbes et des radicelles.
- Des cavités ou des supports pour l'accroche des nids. Elles choisissent souvent la jonction entre un mur et un avant-toit ou une poutre, ou tout autre angle entre une surface verticale et une horizontale surplombante. L'hirondelle rustique préfère l'extérieur des bâtiments. Sur des murs trop uniformément lisses, il est possible d'ajouter une corniche adaptée au style de la maison, ménageant un espace disponible pour un nid sous le toit. Une bande d'enduit grossier sous le toit fournit aussi aux oiseaux un support pour démarrer la construction du nid.
- A défaut, des nids artificiels en béton-bois, si possibles groupés car les hirondelles aiment à nicher en colonies. Ils doivent avoir une petite ouverture sur le bord supérieur. Les hirondelles de fenêtre ont besoin d'une ouverture très étroite où un oisillon peut passer la tête, les hirondelles rustiques aiment les ouvertures un peu plus larges, où trois ou quatre petits, ou plutôt trois ou quatre gosiers ouverts, peuvent s'aligner.
- Des bâtiments ouverts, ou bien des ouvertures permettant des accès aux greniers ou aux granges. L'hirondelle rustique est aussi appelée hirondelle de cheminée (au sens des grandes cheminées-fumoirs anciennes) ou hirondelle des granges, ce qui doit inspirer nos aménagements. L'hirondelle de fenêtre préfère l'extérieur des maisons.
- Des insectes, beaucoup d'insectes, les zones humides et les étangs étant leur fournisseur favori. Elles ne fréquentent pas les flaques ni les mares des lieux arborés, il leur faut un espace dégagé à végétation basse car elles se nourrissent et boivent en vol en rasant l'eau à pleine vitesse. Elles s'approchent néanmoins des arbres pour y chasser les insectes qui y vivent.
- Et évidemment une absence totale de pesticides.
Protéger les bâtiments des fientes
L'acceptation des hirondelles par les humains a une limite, qui a causé quelques destructions stupides : les fientes tombant des nids. La solution est simple, basique : installer une plaquette à la manière d'une étagère sur les murs au-dessous des nids.