Les jardins des Marais de Bourges, un patrimoine en danger
La faune et les jardiniers se partagent les 135 hectares des Marais de Bourges, passés en quelques siècles d'un statut de zone inhospitalière à celui de pays de Cocagne, classé comme site naturel depuis 2003. Vous pouvez le visiter en promenade organisée en barque ou librement, à pied.
C'était un marécage hostile qui bordait la ville de Bourges. Les troupes de Jules César s'y sont enlisées, et les habitants dédaignaient ces "terres fétides et nauséabondes". Puis au fil des siècles les marais ont été conquis et apprivoisés. D'abord le besoin de force motrice a poussé à construire des moulins, à grain, à huile, à drap, à poudre, ou pour la scierie et les forges. Les biefs qui ont été creusés pour canaliser l'eau ont conduit peu à peu à maîtriser un réseau de "coulants", à drainer les terres et à créer des jardins maraîchers.
On peut dater la création des jardins de 1640, l'année ou la ville a vendu ses communaux. Les acquéreurs avaient obligation de mettre en valeur les parcelles, riches en humus et en limons, et d'en faire des jardins. Ils ont alors creusé des fossés extérieurs et intérieurs, et organisé des chemins de desserte. Les parcelles constituées par ces nouveaux réseaux de terre et d'eau ont été louées aux habitants pour les cultiver. Ainsi naquit la profession de "marétier", maraîcher des marais. Puis cette activité, concurrencée par les légumes arrivant du Val de Loire par le train, et devenue trop peu rentable, a progressivement disparu. Le dernier marétier a cessé son activité e 1976.
Les parcelles maraîchères ont peu à peu été morcelées. Aujourd'hui, les 135 hectares des Jardins des Marais sont divisés en plus de 1200 parcelles détenues par un millier de propriétaires.
Après quatre siècles d'améliorations et d'entretien quotidien, les jardins du Marais sont en danger.
La faune
On y trouve une multitude d'amphibiens (crapauds, grenouilles...), de papillons et libellules, d'oiseaux des jardins, des canards colverts, foulques macroules, poules d'eau, hérons, cygnes... On y rencontre quelquefois des chevreuils. L'écosystème est perturbé par une espèce invasive, l'écrevisse de Lousiane, et l'apparition de ragondins qui détruit les berges.
La flore
Le saule y est roi, sous toutes ses formes, pleureur, en trogne, en haies.
Les plantes locales côtoient les plantes ornementales qui s'y sont naturalisées, pontédéries, phragmites, pesse d'eau, iris des marais, et aussi malheureusement des plantes exotiques qui s'y sont trop bien implantées comme le myriophylle du Brésil et la jussie.
Les périls
Le maraîchage pour la consommation personnelle des jardiniers disparaît peu à peu. La population vieillissante refuse de vendre ou de louer, et préfère laisser les parcelles en friches, sans compter que les successions ne se passent pas toujours bien. De nombreuses parcelles deviennent des jardins d'ornement ou d'agrément occupés en grande partie par de la pelouse. Le manque d'entretien entraîne l'envasement des "coulants", envahis par la végétation. La jussie et le myriophylle du Brésil se multiplient à grande vitesse, dont les opérations d'arrachage collectif ne viennent pas à bout.
Pour se maintenir en état le marais a besoin d'une régulation constante du débit d'eau. Malgré les aménagements, une partie des marais reste inondable et exige certaines années une lourde tâche de remise en état.
La partie des marais qui n'est accessible que par les canaux demande un travail supplémentaire pour entretenir une barque et du temps pour se déplacer. Deux associations de propriétaires déploient des efforts considérables pour maintenir le marais en état mais la tâche est immense. La préservation du site repose en grande partie sur leurs épaules.