Maladies des pattes des oiseaux
Je vois régulièrement des photos d'internautes qui se demandent pourquoi certains oiseaux semblent avoir trempé les pattes dans du muesli au miel. Ce sont en réalité des excroissances provoquées par plusieurs maladies ou accidents, qui dans les cas les plus graves sont extrêmement handicapantes et peuvent conduire à la mort des oiseaux. Elles ont l'aspect d'écailles, de croûtes ou de tumeurs quelquefois impressionnantes par rapport à la taille des pattes.
Selon le site Ornithomedia, plusieurs maladies peuvent provoquer ces excroissances :
- la gale, provoquée par des acariens,
- la papillomatose, d'origine virale,
- la pododermatite plantaire, provoquée par une carence en vitamine A et, pour les oiseaux d'élevage, des perchoirs inadaptés,
- la poxvirose ou variole aviaire, d'origine virale, qui n'atteint pas que les pattes.
Une simple observation ne suffit pas toujours à les distinguer. L'âge et les accidents peuvent aussi modifier la forme des pattes.
Soigner ?
L'objet de ce petit point n'est pas de donner des recettes pour soigner les oiseaux sauvages. D'abord il faudrait les capturer, ce qui est interdit pour la majorité des espèces, ensuite, pour distinguer les maladies entre elles et donc adopter les bons traitements, il est quelquefois nécessaire d'effectuer des analyses ou observations au microscope ; quant aux soins, ils peuvent aller jusqu'à la chirurgie. Enfin, la manipulation d'un oiseau malade est risquée.
Seuls un centre de faune sauvage, la LPO ou un vétérinaire pourront vous donner le bon conseil sur la conduite à tenir en fonction des circonstances. En revanche, nous pouvons au moins rechercher comment ne pas contribuer à la propagation des maladies.
Comprendre les causes
La gale des pattes
Visuellement, on a l'impression de petits développements écailleux, de miettes collées.
La maladie est due à des acariens qui creusent des galeries sous la peau, ce qui provoque des excroissances et croûtes sur les pattes. Les ongles se craquellent. Parfois sont atteints le bec, les paupières, les joues...
L'évolution de la maladie est très lente : 6 à 12 mois pendant lesquels l'oiseau peut paraître normal, mais en regardant de près on peut tout de même voir des petits trous creusés par les acariens. La gale entraîne une perte de mobilité, des difficultés à se percher, des démangeaisons. Elle peut provoquer à terme la mort de l'oiseau.
Plusieurs espèces de passereaux sont touchés, le plus sensible à la gale étant le pinson des arbres.
Seul un vétérinaire peut effectuer le diagnostic, par prélèvement examiné au microscope. Pour les oiseaux captifs, il existe des traitements, difficiles à appliquer sur des oiseaux sauvages : isolement, nettoyage de l'environnement, ramollissement des croûtes à la vaseline, Sarnacuran, Ivermectine, etc.
La papillomatose aviaire
Visuellement, les pattes semblent porter des petits buissons épineux blancs ou jaune clair.
La maladie est provoquée par des papillomavirus. On appelle papillomes ces petites excroissances sur les pattes en forme d'écailles accumulées. Elle est difficile à différencier de la gale.
Les excroissances se développent très lentement, mais elles peuvent finir par englober toute la patte. Cela limite la mobilité de l'oiseau, voire entraîne la perte de l'usage de la patte. Selon Ornithomedia, les lésions ont tendance à se multiplier, mais peuvent aussi régresser spontanément et demeurer longtemps invisibles (2 à 18 mois) puis réapparaître.
Une infection secondaire peut se développer sur les lésions.
Le diagnostic passe par une biopsie et une analyse en laboratoire. Le traitement pour les oiseaux captifs consiste à isoler l'oiseau malade, à enrichir l'alimentation en vitamine A, à surveiller les infections secondaires, voire à exciser de façon chirurgicale.
La pododermatite plantaire
Visuellement, on observe des callosités et gonflements en forme de gangues de boue sur lesquels apparaissent des plaies.
La maladie est surtout observée chez les oiseaux captifs. Elle peut être due à des perchoirs trop abrasifs, un surpoids ou une carence en vitamine A.
Les symptômes sont successivement des articulations gonflées, une peau lisse, amincie et irritée, des callosités sous les pattes, puis des plaies et des lésions virant au bleu foncé ou au noir. Des infections peuvent se développer sur les lésions.
Cette maladie est rare dans la nature.
Pour les oiseaux captifs, les éleveurs doivent apporter de la vitamine A sous forme de légumes, revoir leurs perchoirs. Ils disposent d'une batterie de traitements anti-inflammatoires et antibiotiques. La chirurgie peut être un dernier recours.
La poxvirose ou variole aviaire
Visuellement, elle prend la forme de masses globulaires rougeâtres, avec une forme particulièrement impressionnante chez la mésange charbonnière (voir photos dans les articles sources).
C'est une maladie très contagieuse entre oiseaux, causée par des virus. Elle ne touche pas que les pattes mais toutes les parties peu emplumées, notamment la tête. Les excroissances sont globulaires et compactes, contrairement à celles produites par la gale ou la papillomatose, plus écailleuses et découpées.
Il n'y a pas de traitement spécifique. Pour les oiseaux de volière les soins consistent à isoler l'oiseau et désinfecter les lésions. Pour les oiseaux de la nature, il faut désinfecter les mangeoires et abreuvoirs, notamment pour éviter la ponte des moustiques, qui sont des vecteurs de contamination, avec une solution chlorée à 5 %. Si vous détectez un oiseau atteint, vous devez arrêter le nourrissage pendant un mois, désinfecter sévèrement, et le reprendre progressivement en surveillant une réapparition d'oiseaux malades.
Ou tout simplement l'âge et les accidents
Le vieillissement peut être une cause de desquamation naturelle des pattes, causée par une accumulation de calcium entre les écailles.
Des accidents, tels qu'une blessure, une morsure, un choc, peuvent provoquer de petites tumeurs bénignes ou malignes. Elles peuvent disparaître spontanément ou, pour les oiseaux captifs (difficile pour les oiseaux sauvages) nécessiter une chirurgie.
Prévention
Les mangeoires, les branches d'attente, les nichoirs sont le support idéal de la contamination de certaines maladies des pattes. Les précautions et règles d'hygiène pour l'éviter seront aussi utiles contre les maladies de toute origine, qu'elle soit bactérienne, virale, parasitaire ou fongique.
1. Organisation des mangeoires et abreuvoirs
Le nourrissage entraîne une concentration d'oiseaux qui n'existe pas dans la nature. C'est un vecteur idéal pour les maladies, que ce soit par contact entre les oiseaux ou par l'intermédiaire des supports, ou via les insectes piqueurs comme les moustiques qui fréquentent les abreuvoirs. Multiplier les postes de nourrissage et les abreuvoirs, en distribuant de petites quantités à chaque point.
2. Déplacement fréquent des mangeoires
Les oiseaux qui se nourrissent habituellement au sol, notamment les pinsons, viennent chercher les restes sous les mangeoires. Pour éviter l'accumulation de nourriture dégradée et de fientes, les déplacer régulièrement d'au moins 5 mètres. Un support de pied de parasol évitera de planter un piquet en terre chaque fois. Les placer au-dessus du gravier plutôt que sur la terre ou la pelouse.
3. Formes et matières
Privilégier les mangeoires suspendues où les oiseaux ne peuvent ni marcher ni laisser leurs fientes : silos, distributeurs... Si toutefois vous optez pour une mangeoire plateau, pour les oiseaux qui ne sont pas acrobates, la désinfection devra être plus fréquente.
Préférer les matières inertes (non biologiques), lisses et lavables, telles les poteries vernissées ou le métal.
4. Nettoyage des abreuvoirs, mangeoires et bassins pour le bain
Les nettoyer au moins un fois par semaine, y compris les bords, avec de l'eau de javel diluée à 5 % * ou un produit désinfectant que l'on trouve à la boutique de la LPO. RINCER et SECHER. Porter des gants de ménage. Si l'on est bien organisé (un petit seau + des gants + une petite bouteille d'eau de javel + une brosse à vaisselle, le tout dédié aux oiseaux), cela prend 5 minutes par semaine.
5. Renouvellement de l'eau et de la nourriture
Donner de petites quantités de nourriture de façon à ce que les mangeoires plateaux soient vides en fin de journée et les mangeoires silos chaque semaine, avec un peu d'expérience vous connaîtrez la quantité adéquate. Eliminer les graines souillées ou moisies, ne pas les conserver d'une année sur l'autre (surtout les arachides). Renouveler l'eau de boisson et du bain tous les jours.
6. Se protéger soi-même
Derniers détails : porter des gants de ménage et utiliser un matériel dédié à cette activité, à stocker loin de la nourriture. Se laver les mains au savon après le nettoyage, utiliser éventuellement une solution hydro-alcoolique. Ne jamais manipuler un oiseau malade ou mort à mains nues.
* Un berlingot de javel Lacroix de 250 ml est dosé à 10,1 %. Ajouter 250 ml pour obtenir 1/2 litre d'eau de javel dosée à 5 %.
Sources, informations complémentaires
Une série d'articles sur le site Ornithomedia. Il s'agit d'articles "archivés", c'est-à-dire accessibles uniquement aux abonnés (tarif 2017 : 6 € pour 6 mois, 10 € pour un an).
D'autres articles de ce blog sur la prévention des maladies des oiseaux, Une tique sur un oiseau, le virus Usutu et Oiseau en détresse.
Les articles de la LPO et de ses antennes régionales ou départementales.
Un article du Centre Vétérinaire de la Faune Sauvage et des Ecosystèmes des Pays de Loire sur la poxvirose de la mésange charbonnière au sein de l'Ecole Nationale Vétérinaire, Agroalimentaire et de l'Alimentation Nantes Atlantique.
Merci aux photographes, Jean-Pierre DRAYE, Stefano RONCHI et Jérôme DM, qui m'ont autorisée à publier leurs photos d'oiseaux atteints.
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